Tourisme Brésil - São Paulo, mégapole en effervescence

Hélène Clément   8 septembre 2012  Voyage
São Paulo vue du toit, à 161 mètres, de l’édifice Art déco Altino Arantes, au centre-ville historique.
Photo : Hélène Clément
São Paulo vue du toit, à 161 mètres, de l’édifice Art déco Altino Arantes, au centre-ville historique.
São Paulo - Quand on parle de São Paulo, on imagine une mégapole congestionnée, polluée, risquée. Sampa (son surnom) n’a-t-elle pas autre chose à offrir que cette triste image ? Que oui ! La cité de 20 millions d’habitants, entrée en 2009 dans le top 10 des villes les plus riches au monde, bouillonne d’activité. Pour l’apprivoiser, il faut prendre le temps de troquer cravate et talons hauts contre jeans et souliers de course et filer à sa rencontre. À pied ou en métro. Elle se révèle alors vivante, créative, énergisante, gourmande… et plutôt belle.


Sampa n’est pas une ville axée sur le tourisme. Mais on y travaille. Selon une étude statistique menée par le magazine São Paulo Outlook, les visiteurs internationaux ne représentent en effet que 10 % du tourisme de la ville, alors que 20 % provient des autres États du Brésil et que 70 % des touristes sont ici par affaires ou pour participer à des foires, des biennales, des congrès. Les journées au boulot sont longues, on accorde peu de temps aux loisirs. Le voyageur passe donc de l’hôtel au bureau et du bureau à l’hôtel, sans doute aux heures de pointe, plutôt allongées, merci.
Pas surprenant qu’il ne retienne de São Paulo que ces interminables bouchons de circulation qui enveniment le quotidien. Moment précis où tous envient les riches Brésiliens qui se rendent au travail par la voie des airs. À São Paulo, on compte presque autant d’hélicoptères privés (452 immatriculés) qu’à New York, qui circulent dans le ciel. C’est dans le centre historique de la ville, au sommet du bâtiment de style Art Déco Altino Arantes, à 161 mètres, que le point de vue sur les 2500 gratte-ciel de la mégapole est spectaculaire. De là, on aperçoit les pistes de décollage sur le toit des immeubles.
Heureusement, avec la venue de la Coupe du monde de la FIFA en 2014, des Jeux olympiques de Rio en 2016, et avec la possibilité d’accueillir l’Exposition universelle en 2020, la ville de São Paulo s’est lancée dans une politique de grands projets — dont la sécurité fait partie — et prévoit notamment la construction de quatre lignes supplémentaires d’autobus ainsi que la prolongation de 62,7 kilomètres de lignes de métro, dont la mise en service se fera sur quatre ans.
Bombardier Transport est chargé de concevoir et d’installer le nouveau système de monorail (Innovia Monorail 300) sur la ligne appelée Expresso Tirandes, le prolongement de la voie bleue entre Vila Prudente et Cidade Tiradentes. Les deux heures nécessaires pour parcourir ce trajet actuellement seront réduites à 50 minutes et le service desservira 500 000 voyageurs par jour.
« Le tourisme n’a jamais fait partie des priorités des Paulistas [les habitants de São Paulo] », explique Eliena R. S. Souza, propriétaire de Spin Brazil Tours, une entreprise de guides touristiques basée à São Paulo. « La préoccupation première, ici, est de faire de l’argent. Pour se payer autos, logement, vêtements et nourriture. La ville se développe très vite et la vie est chère. »
Et puis après, il y a les clichés qui collent à la peau du Brésil. À la simple évocation du nom, l’imagination baguenaude vers des images exotiques de danse, de musique, de sensualité, de langueur, de fête et de forêt tropicale. « São Paulo n’est ni Rio, ni l’Amazone », concède Eliena.
Non, c’est autre chose ! Pas exotique, la mégapole, mais fascinante.
Pas de front de mer ni de perroquets aras ou de singes-araignées. Par contre, on peut voir ces animaux au Jardin zoologique de São Paulo, le cinquième plus grand au monde, situé dans la zone sud de la ville. Ces espaces verts, d’une superficie de 900 000 mètres carrés et recouverts par la forêt tropicale atlantique, abritent 3200 animaux, 200 espèces d’oiseaux, 100 espèces de mammifères ainsi que 98 espèces de reptiles.
Sampa est née du labeur de chacune des communautés qui y ont élu domicile. D’abord les indigènes, les Portugais et les Africains. Ensuite les Italiens et les Japonais. C’est la troisième cité italienne en importance à l’extérieur de l’Italie et la plus grande ville japonaise hors du Japon. Puis, il y a les Allemands, les Anglais, les Français, les Coréens…
Le Paulistano est charmant, courtois (sauf l’automobiliste, qui n’a aucun respect pour le piéton) et surtout très fier de son monstre urbain, même s’il râle sans cesse contre la pollution, la désorganisation et la circulation.
Gastronomie et architecture
Un tel brassage démographique a conduit à une gastronomie prédominante. On mange bien dans la capitale économique brésilienne. Le São Paulo Outlook établit le nombre d’établissements à 15 000 bars, 500 churrascarias (restos de BBQ), 12 500 restaurants dont 250 japonais et 1500 pizzérias. De la lanchonete (comptoir-lunch) du coin au prato feito (plat du jour comprenant riz, haricot, viande et salade) dans un bar, via le botequim (restaurant ouvrier), le rodizio (buffet ou plat à volonté) de sushis, de pizza ou de viande grillée et le restaurant au kilo. Il y en a pour tous les goûts, toutes les bourses.
São Paulo ressemble à New York il y a 20 ans. Une ville hyperactive, un peu intimidante par sa dimension, mais stimulante car elle est traversée par une colossale énergie qui se ressent dès que l’on débarque de l’avion, à l’aéroport international de São Paulo-Guarulhos. Cette ville à la verticale peut paraître anarchique mais elle dissimule bon nombre d’audaces architecturales. Comme l’immeuble Copan — du nom d’une ville maya au Honduras — signé Oscar Niemeyer.
« L’édifice, haut de 115 mètres sur 32 étages, représente un symbole important pour São Paulo. Au moment de sa construction, dans les années 1950, Sampa était déjà sur le chemin de devenir l’une des grandes métropoles du monde, dit Eliana R. S. Souza. D’une surface construite de 120 000 mètres carrés, le Copan se divise en six bâtiments et compte 1160 appartements d’une à quatre chambres, ainsi que 70 commerces. On estime que 5000 personnes y habitent. Il comporte 20 ascenseurs, plus de 220 places de stationnement et, compte tenu du grand nombre de résidants, son propre code postal ! Sa forme sinueuse contraste avec les constructions linéaires du centre-ville de São Paulo. Elle porte la griffe de son créateur. »
Autre œuvre de génie : l’hôtel Unique conçu par l’architecte brésilien Ruy Ohtake. Sa forme de grand arc inversé, troué de fenêtres circulaires tels des hublots surdimensionnés, rappelle un bateau. L’hôtel-boutique, situé sur l’avenue Brigadeiro Luis Antonio, dans le quartier Jardim Paulista, vaut le détour. Pour siroter sur le toit une caipirinha (cocktail national officieux du Brésil composé de cachaça, alcool de canne à sucre très fort, d’un jus de citron vert, de sucre et de glace), ou pour y passer la nuit.
Mythique et astucieux avec ses grandes allées, ses centaines d’eucalyptus australiens, son importante plantation d’arbres tropicaux, ses trois lacs, son pavillon japonais, son planétarium, son musée d’art moderne et son stade de 20 000 places, le parc Ibirapuera, d’une superficie de 1584 kilomètres carrés, le deuxième plus grand de Sampa et le poumon de la ville, mérite qu’on lui consacre une journée entière. Conçu par l’architecte-paysagiste Roberto Burle Max et inauguré le 21 août 1954, c’est à la fois le Hyde Park de Londres, le Bois-de-Boulogne de Paris et le Central Park de New York.
Le parc Ibirapuera est un condensé du Brésil. Au moindre rayon de soleil, on y fait bronzette, discute pendant des heures aux terrasses des cafés, pratique le vélo, le patin à roulettes, le jogging ou la capoeira. Le dimanche, c’est sans doute l’endroit le plus fréquenté de la ville après la cathédrale de Sé et la Basilica de Nossa Senhora de Assunçao, au monastère de São Bento.
Une journée de plus à São Paulo
Derrière sa verticalité, le vrombissement de ses autos, les cris de joie des Paulistas à minuit, après une partie de foot opposant les Corinthians aux Palmeiras ou São Paulo aux Santos, la mégapole qui occupe le 7e rang des dix plus grandes villes au monde réserve encore bien des surprises. Elle captive les artistes et les musiciens, séduit les gens d’affaires. « Stay another day » proclame la publicité de São Paulo Turismo.
Le message s’adresse aux voyageurs d’affaires, nombreux à venir à São Paulo sans jamais pousser leur curiosité au-delà du travail et de la piscine de l’hôtel, explique le président de ce bureau de tourisme, Marcelo Rehder : « Pour les encourager à explorer la ville, nous avons créé sept circuits thématiques dans les régions de Paulista/Jardins (avenue Paulista), du Centro (centre-ville historique), de la zone sud (parc Ibirapuera), de la zone ouest (quartier Vila Madelena, le SoHo de São Paulo) et de la zone nord où se trouvent les grandes écoles de samba qui ouvrent leurs portes aux visiteurs les jours de pratique, en préparation pour le carnaval de la ville. »
Foot, panoramas citadins, architecture, arts, histoire afro-brésilienne, du café, de l’indépendance du Brésil… Sept itinéraires accompagnés d’une carte et d’une description des lieux. Le circuit football mène au stade Pacaembu et à son musée du foot, ainsi qu’au stade de Morumbi. Berceau du football brésilien, São Paulo sera l’hôte de la Coupe du monde de la FIFA en 2014.
São Paulo Turismo propose aussi Turismetrô, une tournée de la ville en métro, avec un guide. Il suffit de se rendre au métro Sé, dans le centre historique, pendant le week-end, à 9h ou à 14h. La visite des sites se fait en anglais et en portugais, au coût du titre de transport.
Et la sécurité à São Paulo ? Attribué en grande partie à une présence policière accrue (et plutôt sympathique) et à de nouvelles lois, le nombre de meurtres est passé en dix ans sous la barre de dix pour 100 000 habitants. « En 2009, on parlait de 51 homicides pour 100 000 habitants, aujourd’hui de neuf pour 100 000. Et le travail se poursuit », affirme Marcelo Rehder.
En vrac
Transport. Air Canada dessert São Paulo àpartir de Toronto.
Hébergement. Si vous êtes à São Paulo en touriste et non par affaires, considérez le fait de loger dans la région Paulistas/Jardins, à proximité de la ligne de métro et des Avenida Paulista et Oscar Freire (magasinage de luxe), afin de vous rapprocher du grand centre, nouveau et ancien, de la ville. Pour un bon rapport qualité-prix : le Quality Suites Imperial Hall; pour une auberge de charme à coût modique : la Pousada Zilah. Très luxueux, l’hôtel-boutique Fasano.
Restauration. Dans Jardins Paulista : Le Rodeio pour une picanha fatiada (morceau de bœuf coupé à la base supérieure de la queue et servi saignant, salé et grillé), un palmito assaso (tronc de palmier grillé servi avec une sauce aux câpres ; le fruit et non le bourgeon) et un plat de cebola tirolesa (oignons panés coupés très fins). rodeiosp.com.br/index.php. Et Figueira Rubaiyat, notamment pour son immense figuier au centre du restaurant. Dans Vila Olympia : Fogo de Chao, pour une churrascaria. Dans Moema : Badejo, pour une moqueca, un ragoût de fruits de mer ou de poisson, un classique de la cuisine bahianaise. Puis dans Vila Madalena : Feijoda de Lana, pour une feijoada (ragoût composé de haricots noirs mijotés avec une grande variété de viandes, notamment de la langue séchée et des parures de porc ; et San Cristovao, pour ses milliers de photos de football sur les murs, qui racontent l’histoire de ce sport roi à São Paulo.
Samba et carnaval. Le dimanche soir, l’école de samba Mocidade Alegre ouvre ses portes aux visiteurs qui souhaitent participer à la pratique (et danser avec eux) en vue du carnaval de São Paulo.
Guides. Comprendre le Brésil et Le brésilien pour mieux voyager, aux éditions Ulysse. Pour des adresses pratiques et de bonnes idées d’hébergement, Brésil, aux éditions Lonely Planet. Pour une bonne compréhension du Brésil, lire Tristes tropiques de Claude Lévi-Strauss, Les chemins de la faim et Cacao Jorge Amado.
Renseignements. Pour les services d’un guide urbain sur la thématique de votre choix (le guide fera tout pour vous accommoder, ainsi sont les Paulistas, des gens adorables), contacter Eliana R. S. Souza (qui parle anglais), + 55 11 99185-2623/5904-2269, contato@spintours.com.br. Pour télécharger ou obtenir les sept circuits thématiques (en anglais) et de l’information touristique sur la ville de São Paulo.
Collaboratrice
São Paulo vue du toit, à 161 mètres, de l’édifice Art déco Altino Arantes, au centre-ville historique. Le quartier de Vila Madalena se distingue par ses rues piétonnes, ses bars et ses restaurants. C’est le SoHo de São Paulo. On y retrouve des galeries d’art et la fameuse rue Beco do Batman où les murs sont réservés aux plus grands artistes de graffitis, tels Highraff et Speto. L’Institut Tomie Ohtake abrite un musée d’art contemporain et des bureaux. L’édifice de 75 mètres de haut mérite le détour pour son audace architecturale. L’édifice Martinelli, dans le centre-ville historique, semble sorti du Manhattan de la fin du XXe siècle. S’élevant sur 35 étages, il fut le premier gratte-ciel de São Paulo en 1929. En prévision du carnaval de São Paulo, un groupe de musiciens s’exerce à la grande école de samba Mocidade Alegre. Le dimanche soir, le public est invité à participer aux répétitions. Un stand de fruits exotiques au mercado municipal, l’endroit idéal pour goûter aux spécialités locales comme les sandwichs à la mortadelle et les pasteis, des beignets farcis à la viande, au fromage ou à la morue).